Je pense que nous allons connaître une évolution constructive de ce qu’est la photographie digitale aujourd’hui, dit photographe Jean Luc Herbert

La photographie en tant que art créatif exige que le photographe non seulement maîtrise parfaitement l’équipement photographique, mais aussi qu’il ait une vision originale, sa propre perception créative du monde et, dans le cas du travail en studio, la capacité de créer une atmosphère de confiance au travers du dialogue avec un modèle. C’est pourquoi la psychologie dans l’art photographique joue un rôle tout aussi important que les compétences techniques. Les qualités professionnelles de Jean Luc Herbert, son talent à regarder dans les yeux d’un modèle pour y trouver le reflet de son âme, l’ambiance qu’il crée dans son studio, lui permettent de réaliser n’importe quelle idée créative et d’obtenir des images vives, pleines d’émotions et, ce qui est le plus important, de vérité et de beauté.

Ce que l’on retiendra de Jean Luc en quelques mots c’est son professionnalisme et son travail sur-mesure. Il dispose d’un studio en Andorre suréquipé dans lequel on appréciera sa capacité d’écoute et sa discrétion. De surcroît, il met à disposition toute son expérience pour former des adolescents et des adultes dans son école de photographie à Ordino (Andorre).

“Parfois, on me demande pourquoi j’ai décidé de devenir photographe. Je crois que je ne l’ai pas choisi ! Mon père avait une caméra et je lui ai demandé très tôt si je pouvais l’utiliser… Je ne lui ai rendue que le jour où j’ai pu m’acheter ma propre caméra ! En fait, mon parcours d’études est double. La psychologie et les sciences de l’éducation ont d’abord été une base et des diplômes qui pouvaient aussi rassurer mes parents à l’époque (!). Mais, comme pour la photographie, l’aide à la personne et l’accompagnement éducatif étaient inscrits en moi. Ce n’est donc pas un choix. Il y a des choses qui s’imposent à votre existence. Dans mon cas c’est exactement ça…

Plus tard, j’ai fait le choix de retourner aux études et d’obtenir les diplômes professionnels de photographie et d’arts graphiques.

J’aime aider les personnes qui le souhaitent à tenter leur chance dans le monde du mannequinat et de la mode. C’est un travail qui me passionne car il allie mes connaissances en psychologie et en sciences de l’éducation avec celles de la photographie.

J’aime aussi détecter des personnes lambda dans la rue ou ailleurs et les aborder en leur proposant de s’essayer comme modèle. Cette démarche demande énormément de savoir-faire et de savoir-être. Et dans presque tous les cas je propose que ces personnes soient accompagnées et automatiquement, lorsqu’il s’agit de mineurs, d’être accompagnés par leurs parents.

J’aime le processus d’apprentissage et l’accompagnement que je peux offrir aux autres. Il est aussi de ma responsabilité que d’enseigner tout ce qu’un jeune modèle doit savoir, autant sur le plan technique, comportemental, que sur le plan moral. Je transmets tous les savoirs utiles pour devenir pro et savoir se protéger.

Nous avons la chance d’avoir ainsi plusieurs jeunes du pays qui se sont lancés dans cette aventure et qui aujourd’hui travaillent dans ce milieu de la mode entre-autres et qui progressent bien. C’est aussi ma fierté de pouvoir contribuer à cela.

Ma technique doit impérativement s’adapter à la personne que je photographie et mes outils sont méthodiquement choisis en fonction de cela.

Presque toujours, les personnes que je photographie me disent qu’elles ne se trouvent pas photogéniques et ma réponse est toujours la même : la photogénie n’est pas le problème du modèle mais la responsabilité du photographe.

Mon travail est essentiellement basé sur l’écoute et l’observation. Je sais que tout est question d’observation, d’analyse et de mise en place de techniques adaptées à chacun.

Je fais aussi de la photographie thérapeutique. De quoi s’agit-il ? Bon, c’est un outil que j’ai développé à une époque professionnelle précise, lorsque je travaillais pour le Ministère de la Justice en France. Il s’agissait d’un programme de réhabilitation des prisonniers, incarcérés pour de très longues peines et en ayant purgé au moins la moitié. Et sur ce programme unique en France, j’avais la charge d’accompagner un groupe de 12 prisonniers durant 3 mois dans un chalet en montagne et de mettre le groupe en situation de vie de groupe simulant un retour en société hors des murs de la prison.

Dans certaines situations, il me manquait des outils pour apporter toutes les réponses efficaces. Et la photographie est ainsi entrée dans l’autre versant de ma formation que j’avais alors toujours laissé hermétique.

La photographie thérapeutique, pour faire très simple, est un travail sur soi, à la rencontre du regard de l’autre. C’est un exercice miroir qui permet de travailler sur sa réalité, sur son auto-estime ou son manque de confiance en soi. C’est un regard précis sur soi qui s’appuie sur les émotions exprimées au moment de la prise de vue (du déclenchement).

Mais revenons à mon studio ! C’est un espace équipé avec une zone de maquillage, une cabine d’essayage, un espace repos, des vêtements à disposition, des voitures classiques à pédales pour les photos d’enfants, des décors amovibles, un choix d’ambiance et de style avec des fonds textures et des fonds lisses au choix, un espace édition et des outils d’impression.

Je parle avec mes modèles pendant le shooting. Cela les aide à se sentir plus à l’aise, plus libre. Cela fait aussi partie de la photographie thérapeutique, si vous voulez. Mes paroles ont autant de poids que mon regard. Il faut plonger le sujet dans une bulle rassurante, une mise en confiance, sans aucun sentiment de jugement. Il est important de dire que la lumière est la nourriture du photographe et cela nécessite une grande maîtrise technique. L’expression du modèle est la résultante du langage qui se crée entre le photographe et son sujet.

J’utilise Photoshop car c’est l’outil idéal pour révéler une photographie digitale comme la chambre noire est l’outil pour révéler une photographie analogique. Mais Photoshop n’est pas là pour sauver une mauvaise photographie. Quant à la retouche à partir de Photoshop, elle se limite pour moi à réhausser ou à diminuer une lumière mal calibrée, ou évidemment à nettoyer des détails que le maquillage (voire quand il n’y en a) n’a pas bien dissimulés. Mais je m’oppose à modifier l’aspect physique des personnes que je photographie. C’est contraire à mes idées. « Il n’y a pas de beauté sans vérité », a dit Peter Lindbergh, célèbre photographe de mode allemand. Et je suis entièrement d’accord avec lui.

Honnêtement, je préfère les photos en noir et blanc. Le B&W permet essentiellement de se centrer sur la personne, d’oublier les artifices et les détails des éléments matériels, accessoires, vêtements etc. En général, la couleur ne me rend pas ce que j’explore. Je recherche l’expression, le sentiment, la vérité et aussi l’intemporalité de la photographie ; c’est l’idée d’une photo pour la postérité, le «pour toujours» comme autrefois (!).

Notre monde et nos outils du quotidien nous poussent à produire de l’image tous les jours, plusieurs fois par jour. Les selfies sont l’antithèse de mon travail du portrait. Le problème, c’est que la photographie digitale nous a plongés dans le consumérisme de l’image, le sans limite. Mais en même temps, elle nous a permis d’exploiter à une très grande vitesse des expressions artistiques, des univers incroyables, des créativités hallucinantes…

La photographie dans l’histoire de l’art est très jeune et elle vit certainement le même virage qu’elle a connu au début du 20e siècle. L’histoire raconte qui étaient les pionniers de la photographie (Felix Nadar) dans les années 1850-1860, je pense que nous allons connaître une évolution constructive de ce qu’est la photographie digitale aujourd’hui…

En fait, la photographie est selon moi à un tournant de son histoire. Le tout-image, nous conduira obligatoirement au contrôle de l’image, à la qualité plutôt qu’à cette débauche de quantité. C’est une très bonne chose pour les photographes car cela impose une régulation et une exigence technique et professionnelle.

Cependant, outre la reconnaissance de la photographie comme art digital, mes orientations ne vont pas dans le sens de ce “tout-business » et de la monétisation… Mais oui, il faut vivre avec son temps et en tant qu’artiste et auteur il faut vivre de son travail !

Et, finalement, je crois que le crypto-art peut être l’un des chemins qui peut emmener l’art photographique dans des endroits plus lumineux, harmonieux et beaux. Et encore une fois, il est important de vivre avec son temps… et l’authentification d’une oeuvre photographique digitale comme objet unique est un réel progrès”.

Le texte : Irina Rybalchenko

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