Le Musée de l’Aéronautique Navale, situé sur le site de l’ancienne base d’aéronautique navale à Rochefort-Soubise en Charente-Maritime (France), est un musée qui comporte plus que 30 aéronefs (avions, hydravions, planeurs, hélicoptères) mais également des éclatés moteurs et des maquettes. Créé en 1988, il s’appelle alors le musée des traditions de aéronautique navale à Rochefort. En 2009 le site, acquis par le département, comprend plus de onze hectares, une tour de contrôle et deux hangars qui abritent les collections sur une superficie couverte de 5000 m2.
Vice-président du Musée de l’Aéronautique Navale et coordinateur du Téléthon de la Charente-Maritime, pilote de chasse de surcroît, Christian Cabanel, nous a emmenés dans une visite guidée détaillée et nous a parlé de l’histoire du musée et de ses objets exposés.
Interview: Irina Rybalchenko
La première question porte sur l’histoire du musée. Comment ce projet est-il né?
Le musée de l’Aéronautique Navale à Rochefort est le seul en France offrant une si grande collection d’avions militaires, y compris des avions à réaction.
Notre musée n’est pas seulement une présentation d’objets inertes.
C’est aussi un hommage rendu à tous ceux qui se sont dévoués, souvent jusqu’au sacrifice suprême, pour leur mission au service de notre pays, la France. C’est aussi une mémoire de faits, d’événements, de prouesses, témoignant de l’épopée des “marins du ciel”. Et c’est pour Rochefort, ville d’art et d’histoire et la Charente-Maritime, un atout touristique supplémentaire appréciable.
Mais pourquoi le musée a-t-il été ouvert en cet endroit précis? Quelle est l’histoire de ce lieu?
La disparition de la marine à voile et l’importance prise par la marine à vapeur, en tonnage et en armement, ont précipité le déclin de l’arsenal.
À partir des années 1880, les autorités locales se sont inquiétées de ce fait, étant donné que la flotte est pour elles d’intérêt industriel et commercial.
En 1911, la ville de Rochefort a été le site d’une des étapes du Tour de France. A cette époque, le vice-amiral De Perrin, diplômé de l’école de défense sous-marine de Rochefort (1878), alors en ville, a fait appel aux autorités locales pour créer un centre d’aviation à Rochefort arguant le fait que l’arsenal était menacé de fermeture.
Ainsi ce lieux fut-il l’un des berceaux de l’aéronautique maritime et, dès 1917, un centre d’apprentissage pour les pilotes de dirigeables et de ballons libres, mus à terre par les fameux “mille pattes”. La majeure partie de ce site est aujourd’hui occupée par l’école de gendarmerie de Rochefort.
Autrement dit, au départ, ce n’était qu’une école de formation de pilotes de dirigeables? Ou ont-ils enseigné d’autres professions ici?
À peu près à la même époque, une école a été créée ici pour la formation de mécaniciens aéronautiques – tous les techniciens de France étaient formés ici (dans les années 50-60, jusqu’à 6500 militaires étaient hébergés sur ce site).
Il y avait aussi une école d’officiers d’aéronautique et l’escadrille d’instruction pour la formation des officiers également. Enfin, il y avait aussi une école de photographie aérienne et une école de météorologie.
A propos du poids historique des dirigeables, quelle était leur fonction principale?
C’était pendant la première guerre mondiale et 1916 marque la première lutte : sous-marins contre dirigeables.
Il est décidé dès 1916 que tous les aérostats et le centre de dirigeables de Saint-Cyr seraient dévoués à la Marine. Les aérostats ont fait merveille affectés à la protection des convois, les ballons captifs sauvaient de la destruction des milliers de tonnes de navires marchands ou militaires. A plusieurs mètres sous l’eau, les sous-marins de l’époque avaient peu de chance d’échapper à la vigilance des observateurs.
Le but initial était alors la protection de matériel : pas questions de laisser dehors des engins de 50 mètres de long, de 10 mètres de diamètre et qui présentaient une énorme prise au vent. Le premier hangar construit était le Garnier. Il était en bois. Il abritait le dirigeable AT10, construit par Astra-Torres.
Depuis combien de temps a été créée l’Association nationale des amis du musée de l’aéronautique navale (ANAMAN) et quelle est sa fonction principale?
lle a été créée en 1990. Elle a pour but d’apporter aide et soutien au musée, d’entretenir et de développer les collections.
Forte de ses 6000 hommes et femmes et de ses 200 aéronefs, l’ANAMAN, dotée de matériels ultramodernes, comme le Rafale, le NH90 Caïman et demain l’Atlantique 2 rénové, est capable tout autant pour porter secours aux naufragés, pister un sous-marin ou même faire feu.
De plus, L’ANAMAN est riche d’une collection de maquettes : soit plus de 1500 maquettes exposées sur une surface de 230 m2 repartie dans 3 salles.
La 1ère salle est dédiée à l’aéronautique navale avec des avions utilisés dès 1912 ainsi que leur évolution jusqu’au Rafale. La 2ème salle consacrée à l’aéronautique civile permet de suivre l’évolution des aéroplanes jusqu’au monstrueux H-4 Hercules du constructeur Howard Hugues. Dans la 3ème salle, sont exposés les avions militaires de tous les pays. Une vitrine spéciale expose le Boeing B-29 Superfortress et ses terribles bombes nucléaires Little Boy et Fat Man lancées sur Hiroshima et Nagasaki.
Je viens de voir aussi la maquette de porte-avions…
Oui, c’est la maquette pédagogique. On peut y voir les pistes aptes à catapulter deux avions simultanément. D’une longueur de 75 m, les pistes leur permettent de passer de 0 à 250 km/h de façon à pousser le régime de moteurs très puissants (atteignant alors 90% de leur puissance). Un porte-avion comme ça accueille plusieurs personnes en même temps.
Combien d’avions un tel porte-avions peut-il accueillir?
Il peut accueillir 40 avions et 2 hélicoptères.
Il dispose d’autonomie de 45 jours car il est nucléaire et ainsi il n’a pas besoin de faire le plein. Mais il ne navigue jamais seul. Les bateaux spécialisés dans la lutte sous-marine et dans la lutte aérienne l’accompagnent toujours. Un sous-marin nucléaire d’attaque croise aussi dans son secteur.
Combien y a-t-il d’appareils dans le musée?
Nous avons ici 37 appareils. Il y a aussi un autre hangar voué à la restauration. Chaque année il y a des concours de restauration avec un prix du patrimoine qui récompense la meilleure qualité de travail de restauration.
Il y a des avions américains, anglais, français, belges…
Des années 60, nous avions deux types d’avions de réaction – le bombardier et l’intercepteur qui protège les autres.
Dans notre collection, il y a Breguet 1050 Alizé – l’avion embarqué de lutte anti-sous-marine. Entré en service en 1959 et modernisé en 1980. De plus, MD 312 Flamant (constructeur : Dassault) – c’est l’avion bimoteurs de transport de passagers. MS 760 Paris II (constructeur : Morane-Saulnier) avec ses missions principales: liaisons aériennes, entraînement au vol sans visibilité et basse altitude pour les pilotes de chasse embarquée…
PA 31 Navajo (constructeur : Piper Aircraft Corporation) se présente sous la forme d’un bimoteur a ailes basses d’une capacité de 6 a 7 passagers. Nord 262 Frégate (constructeur : Aérospatial) avec 2 pilotes, 1 mécanicien de bord, 1 radio, 1 navigateur et 1 radariste; North American SNJ (monomoteur, biplace en tandem, pour l’entraînement et l’école de pilotage avec possibilité de 4 mitrailleuses de 7.62 mm, roquettes et bombes légères); Lockheed P2V-7 Neptune (l’avion de patrouille maritime et de lutte anti-sous-marines, équipé d’un nez vitré et d’un radôme sous le fuselage contenant un radar destiné à la recherche de sous-marines avec 12 membres d’équipage).
Quelques mots sur le célèbre Fouga – nous y avons CM 175 Zéphyr (il a été fabriqué a l’usine Fouga de Toulouse-Blagnac). Utilisé comme l’avion d’école pour la chasse embarquée a bord des porte-avions Arromaches, Clemenceau et Foch. Le Zephyr a été retire du service en 1994, il n’y a pas de successeur. En effet, les pilotes de chasse embarquée français sont désormais formés aux États-Unis .
Parmi les avions supersoniques les plus rapides sont: Vought F 8 E Crusader (vitesse maximale : 1800 km/h) et Jaguar M 05 (1600 km/h).
Nous avons aussi bimoteur Beechcraft Model 18, Aquillon SE 203 (le premier avion a réaction embarqué opérationnel dans la Marine). Le suivant – Douglas C-47 Dakota (masse max de 11793 t), Dassault Super Étendard Modernisé (il existe une vingtaine de configurations différents, en version de bombardier il emporte 6 bombes de 250 kg ou 4 bombes et des réservoirs pendulaires de carburant pour augmenter son autonomie), planeur Caudron C800 (masse totale de 0,44 t), Dewoitine D520 (conçu a partir de 1936 par Emile Dewoitine et capable d’atteindre 520 km/h – d’où son nom), Stampe SV 4G (l’appareil réalisée en 1933 par la firme belge Stampe et Vertongen) et l’avion léger MH 1521 Broussard.
Il y a également des hélicoptères dans votre collection…
Bien sûr! Se sont: Westland WG 13 Lynx – l’hélicoptère bi-turbine construit par la firme britannique Westland en coopération avec Aérospatiale, Bell 47 G (fut construit à prés de 5000 cellules la fin des années 1940 et le début des années 1970 – les ligne de production furent installées en Italie par Augusta, en Angleterre par Westland et par Kawasaki au Japon), SA 321 G Super-Frelon (avec une masse de 13 tonnes à pleine charge, il se classe dans la catégorie des hélicoptères polyvalents de moyen tonnage), Sikorsky HSS 1 (un hélicoptère lourd, à rotor anti-couple, conçu pour la lutte anti-sous-marine, transformé en version assaut pour la durée de la guerre d’Algérie) et Alouette II (constructeur : SNCASE).
L’hélicoptère Piasecki H21C, surnommé banane, mérite une attention particulière. Bi-rotor en tandem, c’est un hélicoptère mixte conçu pour les opérations de sauvetage et de transport. Il a l’autonomie de 650 km.
Vos appareils participent-ils à des vols de démonstration?
Non, ils ne sont pas destinés à cela- on risquerait de se crasher et alors on pourrait perdre des pièces uniques, on ne pourrait peut-être même plus les exposer.
Comment pensez-vous développer le musée? Y a-t-il des sessions de formation pour les étudiants et les écoliers?
Depuis 2014, le musée a ouvert ses portes aux collégiens et lycéens afin de leur faire découvrir les métiers de l’aéronautique, secteur porteur puisque cette industrie doit embaucher 10000 personnes. Ces stages de découverte sont gratuits.
Nos visiteurs, quel que soit leur âge, peuvent également être intéressés par le Stimulateur Breguet Atlantic ou bien par une imposante collection de tableaux de bord déposés d’aéronefs en cours de restauration ou réformés ou encore par notre salle d’aérostation.